Dans le cadre de la réévaluation européenne du glyphosate, les 4 états membres rapporteurs ont publié fin septembre leur rapport (RAR). Notre association a travaillé pendant des semaines sur ce dossier et a décelé de très – trop – nombreux biais !
Ainsi, Générations Futures a mis en évidence de nombreuses failles dans le processus de sélection des études universitaires dans le RAR du glyphosate :
- Rien qu’à la lecture du titre et du résumé, de nombreuses études pourtant pertinentes sont exclues d’emblée (par exemple, des études jugées sur leur fiabilité et non leur pertinence, études décrites lors de conférences pourtant reconnues internationalement, …).
- Une nouvelle coupe est réalisée lors de l’évaluation de la pertinence basée sur l’étude du texte entier. Là, toutes les études de toxicologie réalisées avec des formulations différentes de celles du produit de référence dont l’autorisation est demandée en Europe sont exclues. Cela concerne des centaines d’études ! Aucune justification et aucun moyen de vérifier cette affirmation n’est apportée, la composition des produits étant confidentielle.
Des centaines d’études sont ainsi mises à l’écart et ne seront jamais évaluées…
Nous avons également montré que l’évaluation de la fiabilité des études était faite de manière totalement non transparente et non équitable entre les études universitaires et celles de l’industrie.
Au final, sur les quelques 7000 études universitaires retrouvées, seules 30 études, équivalent à 0.4% des études retrouvées sont jugées pertinentes et fiables sans restriction !
Aucune de ces 30 études n’a pesé dans l’évaluation des critères d’exclusion du règlement 1107/2009 (propriétés CMR et PE) et aucune n’a été considérée comme une étude clé pouvant conduire à la définition d’une dose sûre d’exposition. On peut donc factuellement conclure que la littérature scientifique publiée sur la toxicité/écotoxicité du glyphosate n’a pas influencé l’opinion des évaluateurs dans le RAR du glyphosate dans un sens différent de celui des études non publiées dans des revues scientifiques fournies par l’industrie elle-même.
En parallèle, nous avons montré que la qualité des études de l’industrie, en particulier les études de génotoxicité, montrent des failles méthodologiques importantes remettant en cause leur pertinence et leur fiabilité.
Conclusion
Dans le RAR du glyphosate, tout a donc été fait pour que :
1/ le minimum d’études de la littérature soit considéré
2/ les études de la littérature soient jugées moins fiables que celles fournies par les industriels
3/ les défauts des études de l’industrie soient occultés.
Ainsi, l’industrie et les autorités peuvent au final facilement arguer qu’au regard des très nombreuses études négatives de l’industrie considérées comme acceptables, les études positives de la littérature n’ont aucun poids.
Demandes
« Cette situation nous apparaît comme totalement anormale. En conséquence nous demandons que le gouvernement français intervienne rapidement pour que la méthode de prise en compte des différentes études utilisées dans le cadre de l’évaluation du glyphosate au niveau communautaire soit d’urgence réformée. Il y a en effet urgence à élaborer et mettre en œuvre une méthode garantissant la prise en compte de toutes les connaissances scientifiques disponibles de manière équitable et transparente. » déclare François Veillerette, porte-parole de Générations Futures. « Plus généralement, nous croyons que les biais méthodologiques développés dans notre rapport peuvent se retrouver dans bien d’autres dossiers d’évaluation de pesticides au niveau communautaire. Nous demandons donc également de tout faire, notamment dans le cadre de la présidence française de l’UE qui vient début 2022, pour mettre en œuvre une réforme méthodologique profonde des procédures d’évaluation des pesticides dans l’Union européenne. » conclut-il.
Agir, maintenant !
Notre association invite les internautes, grâce à la plateforme Shake ton politique, à interpeller dès aujourd’hui les agences et les états membres rapporteurs pour leur demander :
- une révision complète de la méthode d’élaboration de ce dossier d’évaluation du glyphosate afin que toutes les données scientifiques, d’où qu’elles viennent, soient prises en compte.
- Qu’en l’attente de cette révision, que les Etats Membres et la Commission européenne s’opposent à la ré-autorisation du glyphosate.
- la généralisation de la nouvelle méthode d’élaboration du RAR du glyphosate à tous les pesticides.
De même, les internautes qui le souhaitent peuvent signer et relayer la pétition interassociative qui a déjà recueillie plus de 235 000 signatures.
Nous mettons également en ligne une vidéo pédagogique pour informer les internautes sur les tenants et aboutissants de ce dossier si emblématique de la question des pesticides et de son traitement au sein de l’UE.
Téléchargez le rapport complet Evaluation du glyphosate: un rapport biaisé
In English: Gyphosate evaluation a severely skewed report