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Micro-fermes, macro effets…et grands espoirs !

Ce 21 novembre la Fondation de France et AgroParisTech organisaient une journée dédiée aux Micro-fermes. Générations Futures était présent et vous propose un compte-rendu de cette journée.

Alors que le modèle agricole dominant impose un système chimiquement intensif, à grandes parcelles monovariétales, de nombreux paysans expérimentent et se lancent dans de nouvelles expériences agricoles. Parmi ces autres formats, les micro-fermes[1], petites par leur taille mais grandes par leurs ambitions, qui se développent partout sur le territoire.

D’après Kevin Morel, doctorant d’AgroParisTech qui a étudié une vingtaine de micro-fermes françaises, ce modèle se caractérise par de petites surfaces (1,2 à 1,5 hectares cultivés pour un équivalent temps plein) associant une diversité des cultures (plus de trente types de légumes), peu d’investissement (pas toujours de mécanisation) et différents systèmes de cultures (agriculture biologique, agroforesterie, permaculture…). Ces micro-fermes relèvent aussi principalement d’une démarche globale mêlant de fortes aspirations sociales (qualité de vie, autonomie, revenu décent) et environnementales (engagement, préservation des ressources, de la biodiversité).

Une micro-ferme est donc pensée de manière interdépendante : organisation du travail, gestion technique et écologique, commercialisation des produits et investissements sont abordés comme un ensemble et non comme des caractéristiques séparées.

Les choix stratégiques sont d’ailleurs réalisés en fonction des situations locales. Ainsi, les paysans privilégient des espèces rustiques et en fonction des terroirs, de leur sol ou encore des produits cultivés aux alentours. Les modes de production sont larges tout en restant dans le champ de l’agriculture biologique, en s’inspirant de techniques comme l’agroforesterie ou issues de la permaculture. En cela les micro-fermes sont un très bon terrain d’expérimentation et d’acquisition de savoir-faire.

Pour la commercialisation des produits, les paysans se tournent le plus souvent vers des circuits-courts mais s’adaptent à la demande locale et à l’existant. Certains décident de se concentrer sur un lieu de commercialisation (panier à la ferme par exemple) alors que d’autres élargissent la vente à différents circuits : amap, marchés, vente à la ferme, restauration…De même, la période de commercialisation peut être réduite à neufs mois comme être étalée sur toute l’année.

Quant aux paysans qui cultivent ces micro-fermes, ils ont dans presque tous les cas connu une reconversion professionnelle. Dans les fermes étudiées par Kevin Morel, les profils sont d’ailleurs très variés puisque les paysans d’aujourd’hui sont d’anciens juristes, assistantes sociales, informaticiens, employés de la Poste… Ce retour à la terre est pourtant bien plus qu’une simple reconversion professionnelle puisqu’il constitue un projet de vie à part entière pour ces femmes et ces hommes désireux de redonner du sens à leur travail, de gagner en autonomie, de se sentir plus proche de la nature ou encore d’agir en protégeant l’environnement.

Ce « nouveau concept » s’inscrit dans une histoire plus vaste inspirée des pionniers de la bio et de questionnements paysans sur l’importance d’un modèle agricole permettant de préserver les ressources naturelles, nécessitant un réel savoir-faire qui soit basé sur l’expérimentation sur le terrain et permettant d’accéder à une réelle autonomie.

Des paysannes et paysans de micro-fermes sont venus également témoigner de leurs expériences, leurs réussites et de leurs difficultés. Malgré les difficultés (temps de travail important pour un niveau de vie simple, nombreuses concessions familiales, échecs techniques les premières années, difficultés d’accéder à la terre etc.), tous les témoignages s’accordaient sur le fait que malgré tout, ils ne reviendraient pour rien au monde à leur ancienne activité.

Reste la question de la rentabilité et du revenu. Plusieurs modèles économiques existent sur les micro-fermes avec en fonction des fermes, différentes stratégies. Les travaux de Kevin Morel démontrent deux stratégies d’investissement notamment un modèle « bas coût » où l’auto-construction et les achats d’occasion dominent et un modèle à « haut coût » où le neuf et la construction par des artisans dominent.

La question de l’accès à la terre est également centrale et dépend là encore des cas entre des paysans qui étaient déjà en possession de terres pour lesquels l’installation a été plus facile et d’autres qui ont dû emprunter et mettront peut-être plus de temps à atteindre la période dite « de routine » qui permet de dégager une certaine rentabilité. Heureusement, l’accès à la terre peut être aujourd’hui facilité avec des organismes comme le réseau Reneta qui accueille des acteurs du monde agricole (agriculteurs, éleveurs, maraîchers, boulangers paysans…) et met à leur disposition des terres et des outils pour qu’ils puissent expérimenter, se former et pratiquer en attendant d’accéder au foncier. Les collectivités territoriales peuvent également jouer un rôle en installant des agriculteurs sur des terres publiques. Ainsi, la ville de Tours, en partenariat avec Tours Habitat et leur projet des « Jardins perchés » : un immeuble de 75 logements sociaux accompagné d’une micro-ferme et de serres sur les toits, permettant d’installer un maraîcher bio, permettant de fournir des produits sains, locaux et de qualité aux habitants est l’un des exemples ambitieux de ce que peut faire une collectivité.

Cette journée, riche en informations, échanges et témoignages, a permis de démontrer que ces nouvelles pratiques, mêlant agriculture paysanne et bio qui gardent un fort lien au citoyen et au territoire, se développent en opposition au modèle agricole dominant et constituent désormais une des alternatives possibles à ce modèle dont on ne compte plus les effets néfastes.

[1] dont la plus connue reste sans doute celle du Bec Hellouin

Crédit photo : CC FLickr – Organic Farm 2012

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