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Plan de sortie du glyphosate : Un rapport qui sonne comme un renoncement à l’interdiction!

Dans le cadre du ‘plan de sortie du glyphosate’ engagé par le gouvernement, l’Anses a lancé une évaluation des alternatives non chimiques à cet herbicide dont les résultats ont été rendus publics ce 9 octobre 2020.

Le travail de l’Agence a consisté à identifier des usages de glyphosate pour lesquels des alternatives à l’utilisation de cet herbicide sont déjà couramment utilisées sans présenter d’inconvénient pratique ou économique majeur, en se basant sur trois rapports produits par INRAE pour les cultures (il s’agit en fait des rapports de INRAE sur l’évaluation économique des alternatives au glyphosate). Pour la forêt, l’Agence a utilisé des informations transmises par l’ONF et le Centre national de la propriété forestière.

Les résultats sont, il faut le dire, très décevants. En effet les usages de glyphosate possédant des alternatives considérées par l’ANSES comme d’usage courant et sans inconvénient majeur et pour lesquelles l’usage du glyphosate ne devrait plus être autorisé, sont limités.

Ainsi :

En viticulture comme en arboriculture fruitière seul le désherbage mécanique entre les rangs est considéré comme une alternative d’usage courant au glyphosate par l’ANSES (et encore avec quelques exceptions pour des cultures comme les noix, les noisettes ou les pommes à cidre). Les surfaces maximales traitables sont donc de 20% de la parcelle pour la vigne et de 40% pour l’arboriculture fruitière. Mais ce progrès est en trompe l’œil pour l’arboriculture car l’INRAE indique que, dans la grande majorité des cultures étudiées (95 % des surfaces), l’inter-rang est actuellement enherbé. La gestion de l’enherbement de l’inter-rang est donc déjà réalisée le plus souvent mécaniquement. Interdire le glyphosate sur l’inter rang en arboriculture n’aura donc que très peu d’impact sur les quantités utilisées. Pour la viticulture une proportion non précisée de vignes tolère déjà également des inter-rangs enherbés. L’Anses ne retient pas le désherbage sur le rang dans ces cultures comme une alternative valable car elle avance l’impossibilité de disposer à court terme sur le marché français de machines agricoles permettant le désherbage sous le rang, en viticulture et en arboriculture. Générations Futures regrette que le rapport ne souligne pas que ces moyens mécaniques sont des alternatives appropriables à court terme pourvu qu’un plan d’aide à l’investissement pour les producteurs soit mis en place rapidement, ce qui ouvrirait des perspectives d’évolution réelles pour l’avenir.

En forêt : seule la dévitalisation mécanique de souches ou d’arbres non vendables est retenue comme alternative au glyphosate. Le glyphosate restera autorisé pour les autres usages (pépinières, plantations, dégagement après plantations ou il sera autorisé pour une période limitée aux premières années de développement). Là encore le progrès proposé est en trompe l’œil puisque le rapport précise que l’usage du glyphosate pour la dévitalisation… a presque disparu en forêt ! Les alternatives au glyphosate existent pourtant pour tous les usages (le rapport dit qu’il n’y a pas d’impasses techniques !) mais à l’exception de la dévitalisation ne sont pas retenues pour cause « d’inconvénients pratiques et économiques » !

Pour les grandes cultures seul le labour profond effectué en été ou en automne en vue de l’installation d’une culture d’hiver, ou d’une culture de printemps sur des sols à bonne capacité de ressuyage a été retenu comme alternative courante et viable au glyphosate (et pas pour les cultures de printemps en sol hydromorphe). Pourtant le rapport précise que des techniques alternatives existent pour détruire mécaniquement les adventices en intercultures (roulage, travail superficiel, travail profond sans retournement…) qui combinées à des pratiques culturales (modification de la rotation, faux semis, etc.) pourraient permettre à moyen terme de développer de nouvelles stratégies permettant de réduire les adventices, mais ne retient pas ces alternatives comme courantes ! Aucune incitation à les mettre en œuvre à court terme n’est avancée, ce qui ne va pas aider à faire baisser la dépendance de l’agriculture au glyphosate ! Pour l’agriculture de conservation et les parcelles où seul un travail du sol superficiel est réalisé (15 cm maximum) l’usage du glyphosate restera donc autorisé, sans que soit clairement définies ces pratiques. On peut donc craindre que de plus en plus de cultivateurs s’en réclament, avec des niveaux de pratiques très variables, pour pouvoir continuer à employer du glyphosate ! Par ailleurs le rapport recommande de réduire la quantité annuelle maximale par ha de glyphosate à 1080 g de substance active par ha (par rapport à un maximum de 2080 g/ha actuellement). Là encore la réduction avancée est en trompe l’œil car le rapport précise par ailleurs que « la dose moyenne de glyphosate appliquée par parcelle est de 824 g/ha » actuellement. Plafonner à 1080 g/ha ne va donc pas changer grand-chose…

Conclusion :
Ce rapport de l’ANSES est très préoccupant car il n’avance qu’un nombre très restreint d’usages pour lesquels des alternatives au glyphosate existent qui doivent être considérées comme courantes et sans impact économique. Pour ces usages le glyphosate sera interdits. Elles ont été sélectionnées en observant les pratiques d’une agriculture aujourd’hui très dépendante au glyphosate sans chercher à retenir celles qui, bien que considérées non courantes aujourd’hui, pourraient le devenir demain, avec quelques aides PAC ciblées pour la réduction des pesticides par exemple. Le rapport ne va donc pas créer une vraie dynamique pour les changements de pratiques mais plutôt acter une sorte de statuquo en n’encourageant pas clairement la montée en puissance d’alternatives déjà existantes pour la plupart.

Générations Futures déplore donc que ce rapport fige un nombre important d’usages de glyphosate pour très longtemps. Cela signe un renoncement à une véritable sortie du glyphosate alors même que le chef de l’Etat avait demandé au gouvernement en novembre 2017 « de prendre les dispositions nécessaires pour que l’utilisation du glyphosate soit interdite en France dès que des alternatives auront été trouvées, et au plus tard dans trois ans ». Ce rapport indique donc clairement que l’état a renoncé à sortir du glyphosate malgré les promesses faites…

 

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