Générations Futures réagit à cette publication.
Glyphosate : Une action juridique du journal Le Monde
Suite à une action juridique du journal Le Monde l’ANSES (Agence sanitaire qui évalue les pesticides en France) publie, enfin, un document d’expertise sur la génotoxicité du glyphosate, gardé secret depuis 2016.
Générations Futures dénonce cette publication tardive et demande la réalisation des nouveaux tests de génotoxicité sur les herbicides à base de glyphosate prescrits par ce rapport caché de l’ANSES ainsi que la suspension de l’autorisation européenne du glyphosate dans l’attente des résultats !
L’Anses a enfin publié son document de travail d’expertise (1) sur la génotoxicité des formulations à base de glyphosate soit disant par « souci de transparence ». Mais la date choisie pour publier ce document, la veille du jugement l’opposant au journal Le Monde, laisse plutôt supposer que l’agence a tenté de devancer la décision des juges.
Un rapport crucial sur l’évaluation de la génotoxicité du glyphosate enterré pour de mauvaises raisons
Dans la notice explicative accompagnant l’expertise, l’Anses argue que ce travail n’avait pas été publié en 2016 car la question de l’évaluation de la génotoxicité des produits à base de glyphosate est traitée et résolue au niveau européen à partir de 2016 : un groupe de travail européen sur les co-formulants a été mis en place en février 2016 et suite à la réévaluation de la substance en 2017, des tests de génotoxicité sont exigés depuis cette date pour l’autorisation des produits à base de glyphosate. Ainsi selon l’agence, « l’exigence réglementaire a donc rejoint les premières orientations des travaux du GECU [nom du groupe d’experts en charge du rapport]. Il n’y avait donc pas lieu de publier ce rapport qui n’a pas été finalisé selon les procédures administratives de l’Anses. De plus, l’Anses précise que « les constats et recommandations du GECU ont bien été portés par l’Anses lors du réexamen des produits à base de glyphosate. Les études de génotoxicité fournies dans les dossiers pour lesquels une autorisation a été délivrée ont permis de s’assurer de l’absence de potentiel génotoxique des produits ».
Pour Générations Futures cette assertion est totalement fausse. En effet, les experts recommandaient pour évaluer de manière sûre et fiable la génotoxicité des formulations à base de glyphosate, la réalisation d’une batterie de tests, incluant 2 tests in vitro et un test dit ‘des comètes’ in vivo. En effet, comme il existe de nombreuses alertes dans la littérature montrant des effets génotoxiques lorsque le test des comètes est réalisé sur des formulations à base de glyphosate, les experts ont estimé que ce test, couplé aux tests in vitro, permettrait de statuer sur le potentiel génotoxique et mutagène des produits.
Or, selon la méthodologie européenne, seuls 2 tests in vitro sont nécessaires. Le test des comètes in vivo n’est donc jamais réalisé. Des produits à base de glyphosate ont donc pu être autorisés à partir de 2017 sans que ce test des comètes n’ait été réalisé, comme l’atteste par exemple les évaluations des produit Credit Xtreme et Gallup 360-K.
Les évaluations de pesticides formulés à base de glyphosate ne respectent donc pas aujourd’hui les recommandations que les experts de l’ANSES ont mis en avant dans ce rapport…dont la non publication a donc permis une évaluation moins exigeante de la génotoxicité des formulations à base de glyphosate !
« Une formulation représentative devant être évaluée pour l’autorisation européenne de la substance active, cette non publication a aussi permis une évaluation moins exigeante du glyphosate lui-même, la formulation représentative étudiée dans les dossiers d’homologation en 2017 ou en 2023 n’ayant jamais subi un test des comètes ! » explique Pauline Cervan, toxicologue chez Générations Futures.
Des doutes sérieux sur les effets génotoxiques des formulations à base de glyphosate
De plus l’expertise de l’ANSES montre que des experts du panel ont de sérieux doutes sur la génotoxicité des produits pesticides formulés à base de glyphosate et que les tests exigés et réalisés ne permettent pas d’exclure tout risque de génotoxicité de ces produits ! En particulier, l’avis divergent d’un expert présenté à l’annexe 7 indique « qu’ un faisceau de résultats convaincants représente une véritable alerte sur un effet génotoxique induit par différentes formulations »
« Générations Futures proteste contre la publication très tardive de ce document qui a permis qu’une évaluation au rabais de la génotoxicité des produits à base de glyphosate soit réalisée en Europe jusqu’à aujourd’hui. » déclare François Veillerette, porte-parole de Générations Futures. « Nous demandons au gouvernement français, à la Commission européenne et à l’EFSA de prendre en compte immédiatement les principales recommandations de ce rapport, notamment en matière de test de génotoxicité, afin de revoir de toute urgence la réautorisation qui vient d’être accordée au glyphosate pour 10 ans et qui doit, dans l’attente des résultats de ces nouveaux tests, être suspendue. » ajoute t’il
Pour rappel Générations Futures a publié un rapport en mai 2022 posant la question : « Le glyphosate est-il génotoxique » et déjà nos conclusions à ce moment là étaient assez claires…