Le sujet PFAS fait des émules ! En plus de notre rapport sur la pollution au TFA à Salindres, le 6 février a aussi vu à l’Assemblée nationale l’audition conjointe du député Cyrille Isaac-Sibille (Démocrates), chargé d’une mission gouvernementale sur les PFAS aux côtés de l’IGEDD, par les commissions développement durable et affaires sociales.
Contexte
Suite aux révélations de Vert de Rage sur la pollution aux PFAS dans le sud de Lyon, le député Cyrille Isaac-Sibille interpelle Christophe Béchu, ministre de la transition écologique, sur le sujet. Suite à cela, un plan PFAS, lacunaire, est publié en janvier 2023, et il faut attendre ensuite juillet 2023 pour que se lance sa mission, mandaté par le gouvernement. Générations Futures a été auditionnée par le député Cyrille Isaac-Sibille le 30 octobre 2023 dans le cadre de cette mission.
Le 6 février se tenait l’audition auprès des commissions développement durable et affaires sociales, au cours de laquelle M. Isaac-Sibille a pu présenter son rapport et répondre aux questions des députés. Une conférence de presse s’est également tenue le 7 février à 11h.
Un rapport bienvenu
Contenu
Nous souhaitons revenir sur ce rapport et les recommandations faites par M. Isaac-Sibille. Tout d’abord, nous remercions le député pour son travail et pour son rapport complet, accessible et permettant de très bien cerner la problématique des PFAS. Ce dernier contient 18 recommandations, qu’on peut ainsi résumer :
- il est nécessaire de stopper les émissions industrielles de PFAS en France ;
- le besoin d’informations scientifiques est cruciale ;
- la communication auprès des citoyens, des élus et des administrateurs est nécessaire ;
- La mise en place de normes pour l’ensemble des milieux est fondamentale.
Points positifs
Sans détailler l’ensemble du rapport, il convient de souligner la qualité de celui-ci et de voir que nombre des revendications de Générations Futures, ainsi que nos propres rapports, ont été utilisés; en particulier nous souhaitons souligner les recommandations qui nous semblent aller dans le bon sens.
Sur la limitation à la source:
- L’interdiction de tous les rejets : sûrement la proposition la plus importante et forte du rapport (Recommandation 8);
- La proposition de restriction de certains usages en France, sans attendre la mise en œuvre de la restriction européenne (Recommandation 10 bis).
Sur la surveillance:
Proposition dans la feuille de route de renforcer la surveillance des sols, denrées alimentaires (Recommandations 5, 6 et 7).
Sur la dépollution:
Propose l’application du principe pollueur payeur (Recommandation 18).
Cependant tout n’est malheureusement pas rose ! Certaines conclusions du rapport nous semblent largement discutables.
Nos critiques
Eaux potables : pas d’actions avant 2026
Il n’y a pas de proposition claire en vue de recommander la surveillance de l’eau potable dès aujourd’hui, avant 2026. Nous regrettons que le rapport ne recommande pas clairement la révision de la norme actuelle sur l’eau potable, qui comme le souligne le député sera probablement revue à la baisse dans le futur.
Nos analyses récentes effectuées dans la région de Salindres, montrent qu’il est absolument nécessaire d’élargir la liste des substances à surveiller dans l’eau potable et de faire appliquer une norme concernant le total des PFAS. Actuellement, la France a choisi d’appliquer uniquement la norme européenne sur 20 PFAS. Nous regrettons que le rapport ne recommande pas d’appliquer également la norme proposée par l’Europe pour l’ensemble des PFAS.
Absence des pesticides PFAS
La question des pesticides PFAS et de leur métabolite, comme le TFA, est un sujet absent des recommandations et de la feuille de route. Pourtant, les pesticides PFAS ainsi que leurs métabolites sont responsables d’une contamination diffuse et très importante de l’environnement par les perfluorés.
Le rôle de l’agriculture dans la contamination des milieux par les PFAS n’est pas suffisamment mentionné. Nous regrettons que le rapport ne formule aucune recommandation visant à limiter l’usage des pesticides PFAS ou visant une meilleure surveillance dans les eaux des métabolites, et en particulier du TFA. Cette absence est d’autant plus regrettable que des recommandations incitent à renforcer la surveillance des milieux.
Fluoropolymères vs PFAS : un faux problème
La recommandation n° 1 visant à distinguer 2 sous-familles, les monomères et les polymères, ne nous paraît pas appropriée. D’après la définition donnée par l’OCDE, les polymères appartiennent bien à la famille des PFAS et ils sont tout aussi persistants dans l’environnement que les monomères. Cette propriété de persistance justifie à elle seule des mesures de gestion du risque très fortes. De plus, comme le rappelle très bien le rapport, les PFAS sous forme de polymères peuvent être à l’origine d’émission de PFAS non polymériques, lors de leur synthèse ou de leur élimination. Générations Futures recommande donc de ne pas faire de distinction entre les PFAS monomères et polymères.
Comme indiqué lors de l’audition, le principe de précaution implique d’agir dès maintenant pour limiter le flux de PFAS émis dans l’environnement, souvent en toute impunité. Nous souhaitons donc que le gouvernement, à l’aune de ce rapport et des révélations sur la pollution à Salindres, mette en place le plus rapidement possible des actions concrètes afin de s’attaquer à la pollution au PFAS.
a besoin de toutes les forces vives pour poursuivre son action
