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Rejets de PFAS : Chemours contraint de fermer une ligne de production à Dordrecht

Début janvier, le géant de la chimie Chemours a annoncé avoir fermé une des lignes de production de son usine à Dordrecht aux Pays-Bas. En cause, des rejets de TFA non contrôlés et illégaux. Le groupe, qui risque une amende de 125 000 euros si du TFA est à nouveau retrouvé dans ses eaux usées, a décidé de traiter le problème à la source.

Rejet de PFAS illégal et non contrôlé

L’origine de l’affaire remonte à mai 2023, lorsque l’agence de protection de l’environnement de la province de Hollande-Méridionale1 découvre du TFA dans les eaux usées que Chemours déverse dans les égouts.

Les autorités2 font état, dans une lettre adressée aux Etats provinciaux3, d’une concentration de 84 µg/L de TFA.

Le TFA est un composé de la famille des PFAS, classé comme potentiellement très préoccupant4 par l’institut national de santé publique et de l’environnement néerlandais5.

Or, la société Chemours ne dispose pas des autorisations nécessaires pour rejeter cette substance, au-delà de la limite de déclaration de 50 µg/L. Les autorités l’ont donc rappelée à l’ordre : elle disposait, à compter du 30 août 2023, de 4 mois pour régulariser la situation et limiter ses émissions de TFA. Passé ce délais, l’entreprise pourrait écoper d’une amende de 125 000 euros chaque fois qu’un rejet de TFA sera constaté.

Fermeture partielle de l’usine

La période de sursis accordée à Chemours s’est achevée fin décembre et la concentration de TFA mesurée début janvier par l’agence de protection de l’environnement est cette fois-ci inférieure à la limite de déclaration de 50 µg/L.

Comment Chemours est-elle parvenu à limiter ses rejets ?

L’entreprise a décidé d’arrêter temporairement la ligne de production présumée coupable. Effective depuis décembre, cette fermeture partielle de l’usine illustre le manque de moyens techniques -si ce n’est le manque d’expertise- nécessaires pour permettre aux industriels de maîtriser leurs émissions !

Le TFA, c’est quoi ?

L’acide trifluoroacétique (TFA) est une substance de la famille des PFAS selon la définition de l’OCDE, et un métabolite de pesticide.

Il est utilisé dans de nombreux procédés de fabrication pour ses propriétés fonctionnelles6, mais également en tant que réactif de laboratoire pour l’analyse de peptides, en tant que solvant ou comme catalyseur dans les réactions de polymérisation et de condensation.

En outre, le TFA peut être le fruit de la dégradation d’autres substances, notamment des gaz fluorés réfrigérants, certains pesticides et d’autres PFAS.

Les principales sources de pollutions localisées de TFA sont les usines de fabrication de PFAS, comme celle de Chemours à Dordrecht.

Pourquoi la pollution au TFA est-elle préoccupante ?

Le TFA est un « polluant éternel » : il ne se dégrade pas et persiste dans l’environnement. En outre, alors que sa concentration dans les milieux augmente invariablement, il n’existe à l’heure actuelle aucune méthode efficace de dépollution. Sa grande solubilité dans l’eau lui procure une mobilité importante (diffusion via le cycle de l’eau), si bien qu’on en retrouve aujourd’hui PARTOUT. Enfin, sa capacité à lessiver vers les nappes phréatiques et à infiltrer les réseaux d’eau potable représente une menace pour notre santé à toutes et à tous.

Chemours : un danger aussi en France ?

Le groupe Chemours est également implanté dans les Haut-de-France, où il serait responsable d’une forte pollution aux PFAS. En effet, des quantités de PFAS très importantes ont été retrouvées en 2013 en aval de l’usine Chemours dans les eaux de surface. Nous avons retrouvé dans des échantillons prélevés en 2023 des quantités équivalentes à celles retrouvées en 2013 [1].

Aujourd’hui, Chemours souhaite agrandir son site français. En réaction à cette annonce d’extension, le conseil provincial de Hollande-Méridionale -aux prises avec Chemours à Dordrecht- a alerté la préfecture de l’Oise sur les conséquences probables d’un pareil agrandissement en termes de pollution PFAS dans l’environnement. Les hollandais proposent à la préfecture de l’Oise de partager leur expérience. Mais leur lettre, envoyée en novembre dernier, serait restée sans réponse…

Pire encore, la préfecture indique dans un communiqué n’y voir aucune « alerte ». Au contraire, les autorités françaises vont jusqu’à le soutenir financièrement avec une aide de 800 000 euros !

Que font les autorités ?

Le contraste entre la gestion de la pollution aux Pays Bas et en France est frappant. Tandis que nos voisins hollandais interdisent fermement tout rejet industriel non déclaré de TFA, une seule norme concernant les rejets industriels de PFOS est appliquée en France. Pour tous les autres PFAS, aucune norme ne s’applique..

Analyse des PFAS dans les milieux

Dans un arrêté daté de mars 2023, la préfecture de l’Oise a commandé à Chemours de mesurer régulièrement les concentrations en PFAS dans l’eau (eaux résiduaires, pluviales, souterraines) et dans l’atmosphère. S’il s’agit d’un pas dans la bonne direction, cette mesure manque cruellement de transparence. En effet, seule une partie des substances recherchées est connue du public, le reste est confidentiel. Nous ignorons, par exemple, si le TFA est l’une d’entre elles… Générations Futures réclame donc que ces données soient rendues publiques, ainsi que les résultats des analyses réalisées dans l’eau et dans l’air. 

Nous appelons les autorités françaises à ne plus fermer les yeux sur cette pollution nocive pour notre santé. Il est urgent de surveiller les concentrations de tous les PFAS dans l’eau (potable ou non) et d’instaurer des seuils de concentration réellement protecteurs. 


1 La DCMR

2 Les Gedeputeerde Staten, organe exécutif de la province de Hollande Méridionale.

3 Assemblée législative de la province

4 pZZS

5 Le RIVM

6 L’incorporation de groupes CF3 à des molécules complexes augmente leur stabilité et améliore leur biodisponibilité.

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