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Résidus de pesticides dans l’alimentation, l’eau, l’air : quelle règlementation ?

Résidus de pesticides dans l’alimentation, l’eau, l’air : quelle règlementation ?

Aliments

Dans l’alimentation, la limite maximale de résidus (LMR) est un seuil réglementaire de concentration de résidus de produits pesticides, biocides ou de médicaments vétérinaires, au-delà duquel la commercialisation d’un produit alimentaire n’est plus autorisée, qu’il s’agisse de denrées destinées à l’alimentation humaine ou à l’alimentation animale. Les LMR sont établies après une évaluation des risques. Pour les pesticides, il est important d’avoir en tête que l’évaluation s’intéresse d’abord aux pratiques culturales puis ensuite à la question du risque sanitaire.

Concrètement, une LMR est fixée pour « couple » : un pesticide et un aliment. Ce qui veut dire que lorsqu’un pesticide est couramment utilisé sur un fruit, un légume ou une céréale, la LMR de ce pesticide aura tendance à être élevée pour limiter les risques de dépassement… Il existe des LMR sur tous les aliments bruts mais pas pour tous les aliments transformés (loin s’en faut). Ainsi, si on trouve des LMR pour le raisin, il n’y a rien pour le vin (alors qu’il en est question depuis des années).

A noter aussi qu’il n’y a pas de LMR pour un mélange de résidus de pesticides (contrairement à ce qu’il se passe pour l’eau comme on le verra ci-dessous). Vous pouvez donc vous retrouver face à un cocktail de pesticides (cf. nos différentes enquêtes sur ce sujet : raisin, vin, salade, fraise, céréales, néonicotinoides, glyphosate et céréalesmenus toxiques vs menus bio). D’ailleurs, il n’est pas rare que les agriculteurs préfèrent utiliser une kyrielle de molécules pour éviter de dépasser la LMR pour l’une d’elles. Du coup, lorsqu’on vous dit (comme c’est le cas sur le site du ministère de l’Agriculture) que les LMR « sont établies de façon à rester bien en deçà des seuils toxicologiques, c’est-à-dire de manière à ce que les quantités de résidus qu’un individu est susceptible de retrouver quotidiennement dans son alimenta de manière à ce que les quantités de résidus qu’un individu est susceptible de retrouver quotidiennement dans son alimentation ne soient en aucun cas toxiques, à court et à long terme » on ne peut que s’en étonner, d’autant que ce cocktail n’est pas évalué et que se pose la question des perturbateurs endocriniens (pour lesquels il n’y a pas d’effet seuil) ingérés sur le long terme et parfois à des périodes de vulnérabilité pour les individus exposés (femmes enceintes, fœtus, jeunes enfants et adolescents, personnes immunodépressives etc.).

En compléments, il faut savoir que depuis le 1er septembre 2008, l’UE a harmonisé les Limites Maximales en Résidus dans le cadre du Règlement 396/2005. Le règlement définit les quantités maximales de résidus de pesticides autorisés dans les produits d’origine animale ou végétale destinés à la consommation humaine ou animale. Ces limites maximales pour les résidus (LMR), fixées par la Commission européenne, comprennent:

  • les LMR spécifiques à certaines denrées alimentaires destinées à la consommation humaine ou animale,
  • une limite générale qui s’applique lorsqu’aucune LMR spécifique n’a été définie (une «limite par défaut» de 0,01 mg/kg).

Les LMR applicables à l’ensemble des cultures et des pesticides peuvent être consultées dans la base de données des LMR de la Commission.

Les statistiques des Limites Maximales en Résidus de pesticides

En France, c’est la Direction Générale de la Répression des Fraudes (DGCCRF) qui doit faire les analyses et les transmettre tous les ans à l’UE. Les données sont publiées deux ans après que les analyses aient été effectuées. Ainsi en 2017, nous avons les données des analyses portant sur 2015.

Les données 2017 (portant sur 2015) indiquaient que la présence de pesticides quantifiables a été décelée dans 69,9 % des échantillons de fruits et 36,6 % des légumes. Les dépassements des LMR en 2015 concernent 1,4% des échantillons.

La question du bio

Il est important de savoir que les pesticides de synthèse sont interdits en bio. Cependant, il peut y avoir des contaminations croisées dû à l’agriculture chimiquement intensive ou bien du fait d’une mauvaise application de la règlementation bio par certains producteurs ou transformateurs. Lorsqu’on trouve un ou des résidus de pesticides dans les aliments bio, le lot – voire la parcelle – est déclassé (ne peut donc y figurer le label européen/AB). Il peut aussi y avoir une suspension de l’habilitation voire un retrait. Pour en savoir plus lire le guide d’Ecocert.

Eau

Le code de la santé publique (CSP) édicte les dispositions réglementaires en matière d’eau potable, en application des directives européennes 98/83/CE et 75/440/CEE.

Pour les pesticides, des limites de qualité sont fixées dans les eaux brutes et dans l’eau au robinet du consommateur (on parle de Concentration Maximale Admissible – CMA) :

CMA dans les ressources en eau CMA au robinet du consommateur
2 µg/L pour chaque pesticide 0,10 µg/L pour chaque pesticide (à l’exception de l’aldrine, la dieldrine, l’heptachlore et de l’heptachloroépoxyde : 0,03 µg/L)
5 µg/L pour le total des substances mesurées 0,50 µg/L pour le total des substances mesurées

 

Attention, tolérance accrue !

L’instruction du 9 décembre 2010 relative à la « gestion des risques sanitaires en cas de dépassement des limites de qualité des eaux destinées à la consommation humaine pour les pesticides » prévoit que dorénavant, pour que des restrictions de distribution d’eau contenant des pesticides soit mises en place, c’est 100% de la VMax du pesticide concerné qui soit atteinte, quelle que soit la durée de l’exposition.

Conséquence ? Pour l’atrazine par exemple, pesticide très fréquemment retrouvé dans les eaux en France, la VMax est de 2 μg/L.

> Avant la note de 2010, dès que la valeur de 20% de la V Max était dépassée pendant plus d’un mois, soit 0,4 μg/L d’atrazine, une interdiction temporaire de consommation était prononcée.

> Depuis la note de 2010, c’est 100% de la V Max, soit 2 μg/L d’Atrazine, qu’il faudra dorénavant dépasser pour voir l’eau interdite à la consommation, même si le dépassement dépasse 30 jours !

Autrement dit : on va tolérer dans de très nombreuses localités des quantités de pesticides dans l’eau 5 fois plus importantes qu’avant décembre 2010 ! Générations Futures avait vertement critiqué cette instruction et interpelé la ministre de la Santé, Marisol Touraine, sur ce dossier.

Pour aller plus loin sur les résidus de pesticides dans l’eau : lire aussi EXPPERT 8 sur la présence des perturbateurs endocriniens dans l’eau

Air

Il n’y a pas de seuil à respecter pour la présence de pesticides dans l’air… et donc pas de mesures obligatoires.

Des mesures de pesticides sont cependant faites de manière ponctuelle par les Associations de la qualité de l’air (AASQA). Ce fut le cas en Aquitaine, en Limousin, Midi Pyrénées, en Picardie, ou encore en IDF T1 et T2.