La Cour administrative d’appel de Toulouse vient de rendre une décision importante en matière d’évaluation des risques liés aux pesticides. Saisie par Générations Futures et grâce au travail de ses avocats, la cour a confirmé l’annulation de deux autorisations de mise sur le marché (AMM) de produits à base de glyphosate délivrées par l’ANSES, en raison d’une absence d’évaluation des effets indirects sur l’environnement, via les interactions trophiques.
Une victoire juridique pour la protection de l’environnement
Dans cette affaire, les autorisations avaient été accordées au géant agrochimique SYNGENTA. Or, ces dernières ne comportaient aucune donnée sur les effets indirects que ces produits pouvaient avoir sur la biodiversité — en particulier sur la diversité et l’abondance des vertébrés et des arthropodes non cibles. Pourtant, le règlement européen relatif à l’approbation du glyphosate exige expressément une telle évaluation.
L’ANSES, de son côté, considérait qu’en l’absence de méthode harmonisée au niveau européen, cette évaluation n’était pas obligatoire. Une lecture que le tribunal administratif de Montpellier, puis la cour d’appel de Toulouse, ont fermement rejetée.
Ce que sont les « effets indirects » et pourquoi ils comptent
Contrairement à ce que laissent penser les évaluations trop centrées sur la seule toxicité directe, les produits dits « phytosanitaires » peuvent avoir des impacts graves via des effets indirects :
- en détruisant la flore spontanée (adventices), ils privent les insectes et oiseaux de nourriture,
- en modifiant la composition des communautés végétales, ils affectent les habitats,
- en déséquilibrant les chaînes alimentaires, ils réduisent la résilience des écosystèmes.
Ces interactions trophiques – c’est-à-dire les relations alimentaires entre les espèces – sont essentielles au bon fonctionnement des milieux naturels. Leur perturbation est un facteur bien identifié de l’érosion de la biodiversité.
Une reconnaissance du combat porté par Générations Futures
Depuis des années, Générations Futures alerte sur les insuffisances majeures de l’évaluation des pesticides avant leur mise sur le marché. Nous avons toujours affirmé que l’absence de données ne peut justifier l’octroi d’une autorisation, a fortiori lorsque la réglementation européenne impose une analyse rigoureuse de certains impacts.
Cette décision de justice est donc une avancée importante : elle reconnaît que les effets indirects font partie intégrante de l’évaluation environnementale exigée par la réglementation, et que leur absence constitue un motif d’illégalité.
Nous demandons une remise à plat de l’évaluation des pesticides
Face à l’effondrement de la biodiversité, Générations Futures appelle les autorités sanitaires à revoir leur copie. L’évaluation des risques liés aux pesticides doit impérativement intégrer tous les effets néfastes, y compris ceux qui résultent de mécanismes indirects, comme les interactions trophiques.
Nous continuerons à agir, sur le terrain juridique comme sur celui de l’expertise scientifique, pour faire respecter ce principe fondamental qu’est le principe de précaution et garantir une protection réelle des écosystèmes.