Générations Futures a participé le 19 et 20 octobre aux journées d’automne de la bio à Lorient pour fêter les 20 ans de l’association Bioconsom’acteurs et réaffirmer avec des dizaines d’autres organisations et élu.es le rôle majeure et unique que joue l’agriculture et l’alimentation bio, couplés au commerce équitable, dans la préservation du vivant.
Cette réaffirmation c’est traduite dans un appel rédigé collectivement et présenté à la presse le dimanche en fin de journée.
Retrouvez ci-dessous l’intégralité de l’Appel (en vidéo la lecture de l’Appel), les premiers signataires et en bas de page signez ce texte pour affirmer votre soutien à ce modèle agricole et alimentaire résilient.
Revoir en intégralité ces deux jours et bientôt des photos. A lire en attendant l’article de Ouest France, de France 3 région et du Télégramme sur ces journées.
L’Appel de Lorient : La Bio pour la Vie
La seule agriculture nourricière qui peut faire face au dérèglement climatique, à l’effondrement de la biodiversité et à l’explosion des maladies a besoin de nous toutes et de nous tous.
Car l’État et l’Europe manquent à tous leurs devoirs envers leurs citoyen⸱nes et laissent les paysan⸱nes en agriculture biologique se noyer financièrement, tout en continuant à perfuser une agriculture industrielle, chimiquement intensive, qui a fait taire les oiseaux, qui a éradiqué les insectes, qui empoisonne l’eau potable, l’air, les sols et nous rend malades à petit feu.
Nous, paysan⸱nes, citoyen⸱nes, étudiant⸱es, représentant⸱es de la société civile, et élu⸱es, sommes réuni⸱es à Lorient, dans la continuité de l’appel de Poitiers1 et de l’appel de La Rochelle2, pour lancer un cri : reprenons en main, collectivement, la souveraineté alimentaire de nos territoires, aujourd’hui laissée entre les griffes d’un système destructeur, pour en faire une politique agricole et alimentaire commune.
Ne fermons plus les yeux. Sortons la bio et le commerce équitable de la marginalisation à laquelle veulent les cantonner l’État, les lobbies de l’agriculture industrielle et l’agro-alimentaire !
Ne laissons plus les millions de personnes en précarité alimentaire se contenter des miettes toxiques d’un système agro-alimentaire qui étrangle les producteur⸱rices : chaque personne, quels que soient ses moyens, doit accéder à une alimentation saine, durable et éthique.
Il importe de relocaliser les ressources et les pratiques avec des systèmes alimentaires territoriaux comme édicté par « Une seule santé », une démarche de prévention sanitaire par la préservation de l’environnement.
N’acceptons pas que la loi qui impose 20% de bio dans la restauration collective ne soit pas respectée, mettant la santé de nos enfants et des générations futures en danger.
L’agriculture biologique, paysanne, et le commerce équitable sont des réponses concrètes, déjà déployées sur tout le territoire et qui apportent des solutions durables et vertueuses aux crises actuelles. La bio nourrit mieux, elle nourrit plus. Elle crée plus d’emplois. Elle redonne du sens à de si beaux métiers.
À l’heure où pleuvent les restrictions budgétaires et les régressions législatives, nous l’affirmons : la bio coûte moins cher à la société que l’agriculture industrielle avec ses coûts cachés démesurés, car elle ne nécessite pas la dépollution des eaux, des terres, elle ne rend pas les populations malades, elle ne nous prive pas de la Nature qui nous rend tant de services écosystémiques et environnementaux… et nous procure tant de beauté.
Remettez la bio et le commerce équitable au cœur de l’agenda et de l’actualité, pour vous, pour la santé mais aussi pour vos électeur⸱rices présent⸱es et à venir. Tout le monde est concerné, mais vous, élu⸱es, avez le pouvoir. La bio est reconnue par la communauté scientifique, par l’Union Européenne et même par l’État comme porteuse de solutions globales. Rémunérer justement les producteur⸱rices est au cœur des principes du commerce équitable, tant envers les paysan⸱nes du Sud que ceux du Nord. La solidarité internationale ne s’oppose pas à la solidarité nationale ni à la solidarité locale. La coopération internationale doit l’emporter sur les politiques de repli sur soi et de concurrence déloyale généralisée.
Remettons de l’éthique dans nos achats, car un aliment ne peut être “bon” si sa production va à l’encontre des droits fondamentaux.
Parce que nos enfants et la planète que nous leur laisserons méritent le meilleur, nous, paysan⸱nes, associations, collectifs, élu⸱es, citoyen⸱nes et société civile, exhortons l’État et les collectivités locales à respecter immédiatement l’obligation de 20% de produits issus de l’agriculture biologique en restauration collective, dans le cadre de la loi Egalim et de parvenir à 100%. Nous avons l’intention d’attaquer l’État en justice, pour la santé de nos enfants, de nos écosystèmes et de notre système agricole
La liste des mesures que nous jugeons nécessaires :
[Politique] Une reconnaissance et un soutien accru, immédiat et durable de l’Union Européenne et de la France pour la bio et le commerce équitable :
-
Renforcer les aides à l’installation en bio et les systèmes d’accompagnements, notamment par les pairs, pour permettre l’installation de tous⸱tes
-
Refonder la formation agricole pour qu’elle apporte des compétences agroécologiques, coopératives et de terrain pour accompagner l’évolution des nouvelles générations d’agriculteur⸱rices
-
Augmenter le montant de l’éco-régime (premier pilier de la PAC),
-
Pérenniser et augmenter le crédit d’impôt
-
Utiliser la réserve de crise européenne pour attribuer une aide exceptionnelle aux agriculteur⸱rices bio en cours de conversion ou en grosses difficultés économiques
-
Repenser une nouvelle PAC favorable à la bio et au commerce équitable, qui pourrait privilégier une rémunération par actif, et dont l’application par les états serait obligatoire
-
Généraliser les paiements pour services environnementaux (PSE), reconnaissant les externalités positives de la bio et du commerce équitable : bénéfices sociaux et environnementaux de l’agriculture biologique et du commerce équitable. La quantification des externalités est essentielle pour objectiver l’impact des modes de production sur la biodiversité, le climat, la fertilité et la santé des sols, la qualité de l’eau, la gestion des ressources, la santé humaine
-
Créer des dispositifs fiscaux neutres pour les finances publiques, type bonus/malus, qui pourraient s’appliquer au niveau des transformateurs (bonus en faveur des entreprises qui achètent et transforment des produits bio et équitables, compensé par un malus fiscal payé par les autres entreprises).
-
Augmenter la redevance pour pollutions diffuses dans le cadre des projets de lois de finances (PLF) en vertu du principe pollueurs-payeurs
-
Rédiger une nouvelle loi d’orientation agricole prenant acte des propositions en faveur de la généralisation et de l’accessibilité de la bio et du commerce équitable notamment à partir des travaux du collectif Nourrir.
-
Conditionner les importations de produits alimentaires au respect des normes sociales, environnementales et sanitaires françaises et européennes (mesures miroir)
[Réglementaire] Une politique réglementaire enfin adaptée aux urgences environnementales et climatiques, intégrant les coûts cachés :
-
Interdire des pesticides de synthèse dangereux
-
Appliquer la réglementation européenne pour un véritable contrôle de la toxicité des pesticides dans leurs formulations complètes, et des métabolites de décomposition, avant leur commercialisation
-
Obtenir par les agences sanitaires françaises (ANSES) et européennes (EFSA) que tout produit dont la formulation serait toxique à court ou à long terme soit interdit à la fabrication, la vente et l’usage, dans un cadre professionnel ou amateur.
-
Reconnaître par l’Etat de l’impact de ces pollutions, notamment celles causées par le chlordécone et par le prosulfocarbe.
-
Interdire les publicités à destination des jeunes publics promouvant des produits ultra transformés, trop gras, trop sucrés, trop salés
-
Obliger à des avantages marketing pour les produits bio et équitables
-
Interdire les OGM et nouveaux OGM (NTG)
-
Obliger une transparence immédiate et d’un encadrement sur la répartition de la valeur entre les acteur⸱rices et sur les marges réalisées, en particulier par les enseignes de la grande distribution, les acteur⸱rices de la transformation, les magasins spécialisés
-
Faciliter l’accessibilité des consommateur⸱rices aux produits bio et équitables via une réglementation imposant aux distributeur⸱rices un pourcentage minimum de linéaires ou de référencement des produits bio-locaux et équitables
-
Obliger des contrats commerciaux, basés sur les coûts de production réels, par filière et par zone géographique, et incluant le panier de biens essentiels pour un revenu vital aux agriculteur⸱rices garantissant leur autonomie
-
Mettre en place une politique de protection de la biodiversité et des milieux dont les aires d’alimentation de captage, les pollinisateurs et l’avifaune en particulier
-
Renforcer la stratégie Ecophyto en rendant contraignant l’objectif de réduction de 50% des pesticides reposant sur l’indicateur de référence (NODU)
[social] Une politique sociale permettant le bien manger pour toutes et tous
-
Déployer à l’échelle nationale une sécurité sociale de l’alimentation
-
Former des agent.es de la restauration collective (cuisinier.es, diététicienn.nes, personnels de cuisine) pour atteindre le fait-maison, pour cuisiner des produits bruts issus de l’agriculture biologique, et éduquer les enfants à une alimentation saine et durable, et à une consommation responsable.
-
Soutenir immédiatement l’accessibilité des populations plus sensibles et plus précaires à l’alimentation bio de produits frais peu transformés : la généralisation de paniers gratuits de légumes bio pour les femmes enceintes et dans les 1000 premiers jours de l’enfant, des chèques alimentaires vers les produits bio et équitable pour les étudiant⸱es, les ménages les plus précaires, et les personnes les plus sensibles.
-
Réduire la consommation de protéines animales
-
Mettre en place de coopératives alimentaires territoriales.
[éducatif] Un plan national d’éducation populaire à l’alimentation bio et au commerce équitable.
-
Garantir l’indépendance des acteurs et actrices de l’éducation populaire
-
Appliquer des pratiques éducatives émancipatrices
-
Intégrer un programme national d’éducation au goût et à l’agriculture en concertation avec les partenaires sociaux et associatifs
-
Former les professeur.e.s
-
Sensibiliser à l’interdépendance des santés de l’humain, des animaux, des plantes, des écosystèmes et du climat, selon le concept “Une seule santé” auquel répondent les pratiques agrobiologiques.
-
Sortir des cadres scolaires : visiter tous les espaces qui constituent la chaîne alimentaire,
-
Introduire des espaces d’échanges intergénérationnels et interculturels.
-
Végétaliser les établissements scolaires
Signataires sur place et premier⸱es signataires :
Bio Consom’acteurs, Bio Équitable en France, Collectif les Pieds dans le Plat, SCIC Nourrir l’avenir, Fédération Nationale d’Agriculture Biologique, Commerce Équitable France, France Nature Environnement, Fédération Artisans du Monde, Générations Futures, Biocoop les 7 épis, Optim’ism, GAB56, Agir pour l’Environnement, FAIRe un monde équitable, Biocoop France, Secrets Toxiques, Apro Bio Hauts de France, Au fil des Séounes, le Baranoux, IFOAM France, Stop Monsanto, Terre de liens, collectif 10 mai, Stop chlordécone, Bio Partenaire, l’UNAF
Benoit Biteau, Daniel Salmon, Simon Uzenat, Damien Girard, David Cormand, Aurélie Trouvé, Claire Lejeune, Lisa Bellucco, Boris Tavernier, Marie Pochon, François Dechy
Stéphanie Pageot, Marc Dufumier, Claude Gruffat, Joël Labbé, Rozenn Metayer, Olivier Roellinger, Philippe Pointereau, Lylian Le Goff, Marie Monique Robin, Hugues Toussaint, Dominique Marion, Denis Lairon
1 L’appel de Poitiers, 24 septembre 2023, disponible ici
2 L’appel de la Rochelle, juillet 2023, disponible ici