Tébuconazole : un fongicide dangereux sur la sellette

Générations Futures participe à une consultation publique qui pourrait conduire à l’interdiction européenne du tébuconazole et réitère sa demande d’interdiction immédiate !

Contexte sur la situation du tébuconazole

Le tébuconazole est un fongicide dangereux fréquemment utilisé en France en grande culture^[1]. L’approbation initiale du tébuconazole a été accordée au niveau européen pour une période de 10 ans allant de 2009 à 2019. Cette période d’autorisation a été prolongée 5 fois et court maintenant jusqu’au 15 août 2026. Pour justifier ces prolongations, la Commission prétexte des retards dans l’évaluation du dossier de renouvellement déposé par Bayer en 2016.

Dans le cadre de l’évaluation de ce dossier de renouvellement, le Danemark, qui a été désigné “Etat Membre Rapporteur” du dossier, a proposé, dès 2021, de classer le tébuconazole en tant que reprotoxique de catégorie 1B, ce qui, selon le règlement européen, devrait entraîner une interdiction européenne de la substance. La proposition de classification a été mise en consultation publique pour 2 mois par l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) et a pris fin le 19 janvier 2024.

Tébuconazole: un fongicide extrêmement préoccupant, reconnu reprotoxique et perturbateur endocrinien depuis de nombreuses années

Ce fongicide est actuellement classé comme reprotoxique de catégorie 2, mais cette classification est très discutée depuis de nombreuses années, notamment par certains experts de l’EFSA qui proposent d’envisager une classification en catégorie 1B dès 2014^[2]. En plus de son caractère reprotoxique, de nombreuses études et expertises indiquent qu’il est également un perturbateur endocrinien.

C’est ce que nous avons souligné dans notre commentaire : il ne fait aucun doute que le tébuconazole doit être classé comme reprotoxique de catégorie 1B du fait de ses effets sur la fertilité et sur le développement des fœtus. Ces effets reprotoxiques sont à relier à un mode d’action de perturbation endocrine comme l’indiquent le centre danois sur les perturbateurs endocriniens dès 2014^[3] et l’INERIS en 2021^[4].

Générations Futures engagée dans une action en justice contre l’autorisation du tébuconazole

En plus de ses propriétés toxiques, le tébuconazole est une substance persistante dans l’environnement, ce qui lui vaut d’être considérée comme une substance candidate à la substitution. Par conséquent, sa durée d’autorisation devrait être limitée à 7 ans. Pourtant, son autorisation européenne a été prolongée pour une durée de 7 ans sans que son dossier ne soit ré-évalué. Face à ce constat, et alors que les données sur son caractère reprotoxique et perturbateur endocrinien sont disponibles depuis de nombreuses années, Générations Futures a engagé une action en justice contre la prolongation abusive de l’autorisation du tébuconazole en septembre 2023, insistant sur le fait qu’il est évident que cette substance répond aux critères d’exclusion selon la réglementation européenne

Le comité d’évaluation des risques de l’ECHA a jusqu’en octobre 2024 pour donner son avis sur la classification du tébuconazole. Si le classement en tant que reprotoxique de catégorie 1B est confirmé par l’agence, un grand pas vers l’interdiction européenne de cette substance aura été franchi.

 « Compte tenu des risques avérés sur la reproduction et le développement, ainsi que des indications sérieuses de perturbation endocrinienne, nous appelons à une interdiction au plus vite de cette substance. Notre action en justice et notre participation active à la consultation publique démontrent notre engagement actif pour ce faire. Les arguments avancés par notre association et les données scientifiques disponibles soulignent l’évidence d’une classification reprotoxique 1B devant conduire à l’interdiction de cette substance. La protection de la santé publique et de l’environnement doit prévaloir sur toute prolongation d’approbation. Nous espérons que les autorités compétentes entendront ces demandes et agiront en conséquence. » Déclare Pauline Cervan, toxicologue en charge des questions scientifiques et règlementaires chez Générations Futures