Indicateur pour le suivi du plan Ecophyto : on vous explique la manip’

Générations Futures vous explique pourquoi l’indicateur HRI1 proposé par le gouvernement est biaisé et trompeur et donnerait à voir une fausse baisse de l’usage des pesticides ! 

Le débat fait rage depuis plusieurs jours à la suite des déclarations de Gabriel Attal sur le changement d’indicateur pour le plan Ecophyto qui doit être acté dans les prochaines semaines. Le gouvernement soutient que cela ne compromettra pas la politique française de réduction des pesticides mais qu’il s’agit seulement d’adopter un indicateur européen pour être en quelque sorte à égalité avec les autres états européens. Générations Futures vous explique pourquoi il s’agit d’un leurre.

Tout d’abord rappelons que : 

• L’indicateur pressenti : le HRI1, était sensé s’employer dans le cadre du règlement SUR qui devait planifier la réduction de l’usage et du risque des pesticides au niveau européen. Or la Présidente de la Commission européenne vient de proposer le retrait de ce texte, par ailleurs rejeté par le Parlement européen. Quelle est donc l’urgence d’adopter un indicateur lié à un règlement européen qui vient d’être enterré ?
• Cette demande est d’autant plus surprenante que lors des négociations européennes du projet de Règlement SUR la France a soutenu son propre indicateur national : le NODU qui est l’indicateur du plan français Ecophyto depuis 15 ans ! Seule la pression énorme de la FNSEA de ces dernières semaines explique cette volte-face !

Mais pour saisir ce qui se joue actuellement, il faut comprendre les différences majeures entre le NODU et le HRI1 et le fait que, si ce dernier était retenu dans Ecophyto, il donnerait une illusion trompeuse d’une baisse importante des pesticides en France. En effet : 

• L’indicateur NODU est un indicateur d’usage des pesticides adapté au plan Ecophyto qui depuis ses origines avait clairement pour objectif de réduire la dépendance de l’agriculture aux pesticides. Il fallait donc mesurer le nombre de traitements (NODU = nombre de doses unités)
• L’indicateur HRI1 est un indicateur mixte censé refléter à la fois la baisse de l’utilisation et du risque des pesticides. Il utilise les quantités de substances utilisées en les pondérant par un coefficient censé refléter leur dangerosité…on ne sait donc pas exactement ce qu’il mesure (un mélange d’utilisation et de risque).

Problème : les coefficients de dangerosité sont trop faibles et ne contre balancent pas les quantités plus importantes de pesticides moins dangereux utilisés dans les calculs. L’usage de pesticides dangereux homologués à faibles doses peuvent ainsi donner un indicateur plus faible que l’usage de pesticides à bas risque employés en plus grande quantité homologuée, ce qui est totalement contre-productif dans l’optique d’une transition écologique de notre agriculture car pénalisant par exemple l’agriculture biologique ! La baisse du HRI1 est une baisse en trompe l’œil alors que le NODU donne lui une vision objective de la dépendance de notre agriculture aux pesticides !

Démonstration ci-dessous !

Une vidéo pour tout comprendre : Générations futures et les ONGs européennes vous expliquent les biais de HIR1 dans une vidéo pédagogique ici 

Maintenant comparons ! NODU versus HRI1

L’application de ces 2 indicateurs en France pour les années 2011/2021 est éclairant et va vous montrer comment le HRI1 est un indicateur trompeur qui peut donner à voir une forte baisse alors même que l’usage des pesticides a augmenté ! 

Démonstration :

Données pour le HRI1 : la Commission européenne a réalisé des simulations de l’application du HRI1 pour tous les pays européens et nous avons utilisé ces données. Voir ici : 

Données pour le NODU : nous avons utilisé les données fournies au COS Ecophyto du 11 juillet 2023 par le Ministère de l’Agriculture.

Ce que ça donne pour le HRI1

2011-2021 : 101>68 soit : -32%

Ce que ça donne pour le NODU

2011-2021 (valeurs estimées sur le graphique) : 84>87 soit +3%

On voit bien que le HRI1 est trompeur donne une fausse impression de forte baisse alors même que dans le même temps l’utilisation des pesticides (et donc le NODU) a légèrement augmenté

Conclusion : pour garder un plan Ecophyto ayant comme objectif la réduction de l’usage des pesticides il est indispensable de garder le NODU comme indicateur central du plan Ecophyto, quitte à le compléter par un indicateur de risque complémentaire pour suivre l’évolution du profil des substances utilisées. La suppression du NODU et son remplacement par HRI1 serait un reniement total des objectifs d’Ecophyto et donnerait une impression mensongère d’une réduction purement imaginaire ! Générations Futures appelle donc le gouvernement à un sursaut et à renoncer au HRI1 !