La loi d’orientation agricole visait originellement à déterminer les priorités de la politique en matière d’agriculture pour les prochaines années et à assurer le renouvellement des générations. Son examen, qui a débuté à l’Assemblée nationale sous la 16e législature, a connu une accélération sans précédent avec un passage en séance au Sénat, en commission mixte paritaire et en lecture finale en moins de 3 semaines.
Ce projet de loi a été totalement dévoyé sous l’influence du sénateur Laurent Duplomb et de la droite sénatoriale et instrumentalisé par le Gouvernement afin de faciliter sa venue lors du salon de l’agriculture, et cela au détriment de l’environnement, de la santé et de la tenue d’un débat éclairé et démocratique.
Des députés des groupes La France Insoumise et Écologiste et social ont ainsi décidé en application de l’article 61§2 de la Constitution de saisir le Conseil constitutionnel.
Sa décision a été rendue hier et constitue une victoire partielle pour Générations Futures. Si des dispositions dangereuses pour la protection de notre environnement ont été heureusement censurées, cette décision ne pouvait revenir sur la trajectoire globale du texte qui verrouille notre agriculture dans un modèle qui ne permet pas de répondre aux enjeux du revenu et de la transition agroécologique.
Elle doit cependant servir de leçon au Gouvernement et à l’ensemble des parlementaires à l’heure où se profile l’examen d’un autre texte de dérégulation : la proposition de loi “contraintes”, surnommée PPL Duplomb du nom de son auteur.
Une sage décision pour notre environnement
Le Conseil constitutionnel a frappé fort en censurant près de 18 articles, que ce soit totalement ou partiellement, pour des raisons de fond et de forme.
Parmi les dispositions censurées, celles concernant le principe de non-régression de la souveraineté agricole (article 2), la non « surtransposition » (avant-dernier alinéa du a du 2° du paragraphe I de l’article 1er) ou bien encore la “présomption de non intentionnalité” ( b du 3 ° de l’article 31) ont été écartées.
Nous saluons cette décision qui réaffirme des principes fondamentaux de séparation des pouvoirs, d’intelligibilité de la loi et de protection de l’environnement : des motifs essentiels retenus par le Conseil constitutionnel.
Si ces dispositions avaient été maintenues, l’Exécutif aurait été entravé dans l’exercice de ses compétences, notamment en matière de protection de l’environnement.
“Pas d’interdiction sans solution”
Nous regrettons que le Conseil constitutionnel n’ait pas censuré l’alinéa 31 de l’article 1er inscrivant le principe “pas d’interdiction sans solution”. Générations Futures soutient pleinement la recherche en agronomie qui apporte un ensemble de solutions permettant de réduire l’utilisation des pesticides tout en maintenant le niveau des rendements.
Conditionner l’interdiction de pesticides à l’existence de solutions alternatives est une négation des alternatives déjà existantes au premier rang desquelles l’agriculture biologique. Cela est également contraire à la réglementation en vigueur selon laquelle une substance active ou un produit ne peut être mis sur le marché s’il présente un risque inacceptable pour la santé ou l’environnement. Cette disposition entrave ainsi directement l’application du droit.
Nous condamnons fermement l’ensemble des acteurs qui préfèrent maintenir par ce slogan notre système dans une dépendance aux pesticides de synthèse plutôt que d’agir concrètement en accompagnant les agriculteurs et agricultrices dans la mise en œuvre de ces solutions.
Générations Futures veillera ainsi à utiliser tous les moyens légaux à sa disposition pour agir contre les articles problématiques de cette loi et ce afin de lutter contre les dérives des politiques agricoles menées par les derniers gouvernements qui ne permettent pas d’entamer la reconception nécessaire de nos systèmes de production.