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Des ONG européennes dont Générations Futures engagent une action en justice contre la réapprobation du glyphosate par l’Union Européenne (UE).

Un consortium de six ONG – PAN Europe, ClientEarth (UE), Générations Futures (France), GLOBAL 2000 (Autriche), PAN Allemagne et PAN Pays-Bas – a officiellement lancé une action en justice contre la récente décision de la Commission européenne de ré-approuver le glyphosate. Après avoir mené un examen détaillé du processus de ré-approbation du glyphosate et identifié plusieurs lacunes critiques, les ONG ont soumis une demande de réexamen interne à la Commission européenne, marquant la première étape de cette bataille juridique.

Défaillances majeures dans le processus de réapprobation du glyphosate par la Commission européenne

La Commission européenne, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) n’ont pas respecté leur obligation de protéger les citoyens européens et l’environnement en ne respectant pas le droit et la jurisprudence de l’UE sur la réglementation des pesticides et le principe de précaution.

La Commission européenne a réapprouvé le glyphosate pour 10 ans malgré un ensemble impressionnant de preuves scientifiques indiquant sa toxicité pour la santé humaine et l’environnement.

Angeliki Lyssimachou, responsable du département science et politique chez PAN Europe, a déclaré : « Nous sommes consternés par le nombre incroyable de violations du droit de l’UE. Les preuves scientifiques de l’importante toxicité du glyphosate sur la santé et l’environnement n’ont pas été correctement communiquées à la Commission par l’EFSA et l’ECHA. La Commission a réapprouvé le glyphosate malgré les informations disponibles sur sa toxicité et les nombreuses lacunes dans les données. Cela aurait dû conduire à une interdiction. »

Pauline Cervan, toxicologue chez Générations Futures a déclaré : « Les autorités ont systématiquement rejeté toutes les données de la littérature scientifique indépendante, basant leur évaluation uniquement sur les données fournies par les fabricants. En outre, il apparaît que certaines études clés manquent encore pour différents domaines de l’évaluation, ce qui aurait dû conduire la Commission à ne pas accepter le dossier ( du glyphosate)  pour cause d’incomplétude ».

Helmut Burtscher-Schaden, biochimiste à GLOBAL 2000, ajoute : « Compte tenu des preuves découvertes dans les procès américains concernant les efforts de Monsanto pour influencer les précédentes procédures d’approbation de l’UE, nous nous serions attendus à ce que les autorités examinent particulièrement attentivement les études des fabricants de glyphosate cette fois-ci. Cependant, les autorités ont répété par copier-coller les conclusions des procédures d’homologation précédentes, même lorsque les arguments reposaient sur des études obsolètes de fabricants, qui sont désormais généralement considérées comme inacceptables.»

Margriet Mantingh, présidente de PAN Pays-Bas, a déclaré : « L’évaluation des risques du glyphosate par l’EFSA néglige les effets possibles sur le développement de la maladie de Parkinson et des troubles du spectre autistique chez les enfants, alors que les recherches menées par des scientifiques indépendants soulignent un effet possible. Nous sommes très préoccupés par le fait que la Commission ne protège pas suffisamment ses citoyens. C’est pourquoi nous demandons à la Commission d’appliquer le principe de précaution et de retirer l’approbation du glyphosate. »

Peter Clausing, toxicologue à PAN Allemagne, a déclaré : « Au mépris de leurs propres directives et exigences, les autorités de l’UE ont déformé les preuves des effets cancérigènes du glyphosate afin de parvenir à la fausse conclusion que la substance active n’est pas cancérigène. »

Juliette Delarue, avocate principale de ClientEarth, a déclaré : « Le glyphosate est une substance dangereuse – en l’approuvant à nouveau, la Commission a commis une erreur manifeste face à la loi et à la science indépendante et fiable. Au-delà de cela, les traités de l’UE exigent que la Commission agisse avec prudence pour éviter de nuire aux humains et à la nature. Notre recours demande à la Commission de prêter enfin attention aux données scientifiques et de retirer son approbation

Glyphosate : contexte et retour sur nos arguments juridiques

À l’automne 2023, la Commission européenne a proposé de réautoriser le glyphosate pour 10 ans. Après deux tours de votes parmi les États membres, la Commission n’est pas parvenue à obtenir une majorité qualifiée. Lors du deuxième vote, seuls les États membres représentant 42 % de la population de l’UE ont soutenu cette proposition, mais la Commission a quand même décidé d’aller de l’avant et d’imposer la réapprobation du glyphosate.

Le droit permet désormais aux ONG de contester cette décision

Grâce à une réforme des lois sur l’accès à la justice en 2021, les ONG et les particuliers ont désormais la possibilité de contester la plupart des décisions de l’UE qui enfreignent le droit de l’environnement devant la Cour de justice de l’UE. Les ONG ont envoyé à la Commission une « demande de réexamen interne », dans laquelle elles demandent à la Commission de retirer le règlement sur la réapprobation du glyphosate. La Commission dispose désormais de 22 semaines pour répondre. Si les ONG considèrent que la réponse de la Commission ne résout toujours pas les violations du droit, elles peuvent contester la réponse devant la Cour de justice de l’Union européenne.

Arguments juridiques : Quels sont les manquements de la Commission ?

Les constats suivants constituent la base des arguments des ONG :

1 Sélection de la science

Les experts ont constaté que l’industrie avait fourni des dossiers incomplets dans plusieurs domaines de l’évaluation des risques. Cela n’est pas conforme à la loi et leur dossier aurait donc dû être rejeté par les régulateurs. Dans certains cas, ils ont fourni d’importantes études de toxicité à un stade très tardif, empêchant les régulateurs de les évaluer correctement. En omettant de demander aux acteurs du secteur de fournir une documentation supplémentaire et plus complète, les régulateurs ont fini par produire une évaluation des risques incomplète.

En outre, les ONG ont constaté que l’évaluation de l’UE écarte systématiquement les études non fournies par les industriels. Leur approche systématique leur permet de négliger les découvertes scientifiques majeures du monde universitaire, qui fournissent souvent une meilleure compréhension de la toxicité des pesticides, les études réglementaires étant souvent moins sensibles.

2 Risque de cancer : de nouvelles découvertes scientifiques confirment une nouvelle fois que le glyphosate est cancérigène

Auparavant, les experts des ONG avaient déjà identifié que l’ECHA n’avait pas présenté à la Commission européenne une évaluation de cancérogénicité réalisée selon ses propres règles, ce qui avait pour conséquence de ne pas classer le glyphosate dans la classification « cancérogène 1B », ce qui aurait conduit à l’interdiction du glyphosate.

Par exemple, une nouvelle étude scientifique du célèbre institut Ramazzini a confirmé qu’une exposition à long terme des rats à des doses prétendument acceptables de la formulation représentative peut conduire au développement de cancers du sang. Les cancers du sang (lymphome non hodgkinien) sont la principale raison pour laquelle les plaignants poursuivent Monsanto/Bayer aux États-Unis.

3 Génotoxicité démontrée dans des études non industrielles

L’évaluation de génotoxicité de l’ECHA de 2021 n’a pas réussi à prouver que le glyphosate n’est pas génotoxique, tandis que des études non industrielles basées sur les tests les plus sensibles montrent que l’herbicide est en fait génotoxique. L’évaluation s’appuie toujours sur d’anciennes études industrielles, moins sensibles, et nombre d’entre elles se sont révélées peu fiables d’un point de vue méthodologique. Aucune nouvelle étude n’a été demandée par les autorités pour évaluer la génotoxicité, et bon nombre des scandales de copier-coller de dossiers industriels identifiés dans l’évaluation de 2017 demeurent. La littérature scientifique indépendante la plus récente indiquant le potentiel génotoxique du glyphosate sur des organes spécifiques a été écartée de l’évaluation. Les études industrielles indiquant que le glyphosate peut causer des dommages aux chromosomes sur des lésions de l’ADN ont été déclarées « favorables/supplémentaires ou inacceptables » au lieu de « acceptables ». Cela signifie qu’elles n’ont pas été prises suffisamment au sérieux pour avoir un impact dans l’évaluation globale de la génotoxicité du glyphosate.

4 Neurotoxicité mal évaluée

Le potentiel du glyphosate à impacter le cerveau et le système nerveux n’a pas été correctement évalué. Toutes les études industrielles fournies sont basées sur la toxicité aiguë ou à court terme chez l’adulte et ne permettent pas d’évaluer la neurotoxicité via une exposition maternelle ou la neurotoxicité sous la forme de maladies dégénératives telles que la maladie de Parkinson.

L’industrie a également omis de soumettre une étude de neurotoxicité pour le développement (DNT) réalisée en 2001 sur le glyphosate-trimésium (l’un des sels du glyphosate), qui a montré des effets indésirables sur la progéniture des animaux exposés. L’industrie a également omis de fournir l’intégralité de la littérature indépendante disponible au cours des 10 dernières années, y compris les études soumises lors de l’évaluation précédente de 2015. Des preuves supplémentaires provenant d’études pertinentes soumises lors de la consultation publique ont de nouveau été rejetées par les autorités de l’UE.

5 Le glyphosate affecte le microbiome

Le glyphosate a également été breveté comme agent antibiotique et affecte également le microbiome des humains, des oiseaux, des abeilles et d’autres espèces. Il a été démontré que 50 % des espèces du microbiome humain sont affectées par le glyphosate. Compte tenu du rôle important de l’axe intestin-cerveau indiqué dans la littérature scientifique, les altérations induites par le glyphosate peuvent expliquer la neurotoxicité ou la toxicité pour la reproduction du glyphosate indiquée dans la littérature scientifique. Malgré l’obligation légale d’utiliser les données scientifiques les plus récentes et les plus fiables, l’évaluation des risques de l’UE a ignoré les preuves des impacts du glyphosate sur le microbiome des humains et d’autres espèces pour la raison juridiquement inacceptable « qu’il n’existe actuellement pas d’orientations réglementaires standardisées pour l’évaluation des risques pour le microbiote ».

6 L’EFSA n’a pas divulgué des informations vitales sur la toxicité des insectes, des oiseaux et des amphibiens.

Les investigations menées par les ONG ont montré que si les études réglementaires montraient parfois une toxicité inacceptable du glyphosate pour les insectes (mortalité de 100%, selon les études industrielles), l’EFSA n’a même pas communiqué cette information à la Commission européenne dans son examen par les pairs. En outre, d’importantes études de toxicité menées dans le milieu universitaire, montrant que le glyphosate et les herbicides à base de glyphosate déciment les amphibiens ou nuisent à la reproduction des oiseaux, ont été écartées de l’évaluation par l’EFSA, empêchant ainsi les régulateurs de prendre une décision judicieuse.

7 Aucun essai sur une formulation pesticide complète et représentative n’est fournie.

Le droit et la jurisprudence de l’UE exigent qu’au moins un produit herbicide à base de glyphosate (une « formulation représentative ») soit testé pour son impact sur la santé humaine et l’environnement. L’objectif est d’évaluer la toxicité des autres ingrédients d’une formulation pesticide, ainsi que les synergies de toxicité potentielles entre le « principe actif » glyphosate et les coformulants.

Aucune étude de toxicité à long terme sur les mammifères (telle que l’étude de l’institut Ramazzini mentionnée précédemment) n’a été fournie. Lors de l’évaluation des risques environnementaux, une situation similaire a été observée : l’industrie n’a pas fourni de nombreuses études obligatoires cruciales pour la formulation représentative.

En outre, l’EFSA a reconnu qu’elle n’était pas en mesure d’évaluer tous les coformulants de la formulation représentative, ce qui est là encore contraire à la législation sur les pesticides.

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