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PFAS omniprésents : à quand la réelle action politique ?

Sujet qui devient de plus en plus présent dans les médias, la pollution aux PFAS (les perfluorés – pour en savoir plus lire ici ) est un enjeu majeur de notre siècle. Générations Futures, active sur le sujet depuis plusieurs mois, revient sur la récente enquête publiée par le quotidien le Monde et d’autres journaux d’investigation.

Une enquête redoutable menée par des journalistes

Des journalistes européens se sont organisé pour créer le Forever Pollution Project, projet permettant de représenter, à l’aide de la mise en commun de plus de 100 bases de données, la pollution causée par les PFAS à travers le continent européen. Leurs conclusions illustrées par des cartographies sont glaçantes : plus de 17 000 sites dans toute l’Europe sont contaminés par les « produits chimiques éternels » PFAS et 21 000 sites supplémentaires de contamination présumée due à une activité industrielle actuelle ou passée. La contamination révélée par ce projet s’étend à toute l’Europe.

L’enquête a aussi mis en lumière le vaste projet de lobbying organisé par différentes parties prenantes pour contrer les avancées politiques et coercitives sur la suppression des PFASPlusieurs douzaines de requêtes à Bruxelles et dans d’autres villes européennes ont révélé que depuis des mois, plus de 100 associations industrielles, groupes de réflexion, cabinets d’avocats et grandes entreprises s’efforcent d’influencer la Commission européenne et les États membres pour affaiblir la future interdiction des PFAS ». Les équipes de journalistes ont analysé plus de 1200 documents confidentiels provenant de la Commission Européenne et de l’ECHA, Agence européenne des produits chimiques témoignant que des géants de l’industrie chimique comme Chemours, 3M ou Solvay tentent de s’exempter des interdictions. 

Générations Futures salue ce travail impressionnant et nécessaire pour promouvoir des données scientifiques sur ce sujet.

Pour approfondir le sujet, retrouvez l’épisode dédié du podcast l’Heure du Monde :

« Polluants éternels » : en France, près de 1 000 sites contaminés largement ignorés

L’enquête met en lumière plus de 900 sites contaminés en France. Un chiffre vertigineux qui a pu être trouvé grâce à la mise en commun de plusieurs bases de données.

Les chercheurs précisent qu’ : « une partie importante de ces localisations, soit 108, sont des « hot spots de contamination », c’est-à-dire des échantillons où les concentrations de PFAS sont si élevées (plus de 100 nanogrammes par litre [ng/l]) qu’elles sont jugées dangereuses pour la santé par les experts compétents. » Ils rappellent qu’un certain nombre de ces lieux étaient déjà identifiés par un des laboratoires de l’ANSES, l’Agence nationale de santé.

Grâce à ces recherches, les enquêteurs peuvent désigner une zone :  » la plupart, de Pierre-Bénite (dans le Rhône, au sud de Lyon) jusqu’à la mer Méditerranée, doivent leur contamination aux rejets de seulement deux usines : Arkema et Daikin. » Le relai local lyonnais de Générations Futures est très actif sur cet enjeu en témoigne la dernière manifestation organisée le 4 février 2023.

[crédits photos : © Damien LEPETIGALAND pour le Progrès.]

Vous pouvez aussi retrouver le rapport de Générations Futures publié en mai 2022 sur la pollution des PFAS dans cette région qui concluait  :

  • Au niveau des rejets des usines dans le Rhône on retrouve en quantité importante les PFAS utilisés par les entreprises. Les quantités sont bien supérieures à celles retrouvées en amont du site industriel.
  • Pour l’eau du robinet : tous les échantillons d’eau du robinet provenant des champs captants du Rhône dépassent la norme pour la somme des 20 PFAS de 100ng/l Plus de 200 000 personnes sont concernées.
  • Parmi les échantillons de terre collectés dans le stade et le potager à proximité de l’usine, 5 PFAS dépassent la norme hollandaise pour la qualité des sols.
  • Dans les prélèvements d’air, deux composants sont retrouvés en très grande quantité par rapport aux autres : le 6:2 FTS et le PFHxA, utilisé par l’une ou l’autre des entreprises du site.

Une occasion de réaffirmer le manque d’ambition du plan d’action ministériel du gouvernement

Le 17 janvier 2023, le Ministère de la transition écologique a publié son plan d’actions ministériel sur les PFASGénérations Futures réagissait à cette publication : « Les mesures proposées restent très floues et ne contraignent toujours pas les industriels à limiter leurs rejets de PFAS » déclare François Veillerette, porte-parole de Générations Futures. « Tous les espoirs d’une réduction de la pollution à la source reposent sur la proposition de restriction au niveau européen que l’on espère la plus large possible. Cependant, les délais pour sa mise en œuvre risquent d’être très longs et aucune interdiction n’est à prévoir d’ici 2 ans au moins. »

Bien que Générations Futures saluait le soutien de la France à la proposition de restriction des PFAS déposée par 5 pays européens à l’ECHA, de nombreuses critiques ont été faites sur la surveillance et les normes proposées par le plan comme par exemple :

  • la possibilité d’inclure de nouveaux PFAS à surveiller alors que la Directive européenne Cadre sur l’Eau en inclue déjà 24.
  • L’obligation de surveillance des eaux potables ne se fera qu’en 2026.
  • Il y a une mesure sur la pollution des sols aux PFAS lors de cessation d’activités : cela signifie donc que l’évaluation se fait que lors de cessation ? Quid des sols mitoyens ?
  • Aucune norme sur les rejets des entreprises.
  • Pratiquement aucunes mesures visant la réduction des émissions.
  • Aucun projet de surveillance des poissons et aucune révision méthodologique prévue alors que le dernier rapport de Générations Futures témoigne de la disparité des méthodes d’évaluation.

Ainsi, la nouvelle publication de cette enquête journalistique va, ironiquement, aider le Ministère de la Transition Ecologique à avancer plus vite. Pauline Cervan, toxicologue chez Générations Futures le souligne sur twitter en interpellant le Ministre :  » Voici de quoi alimenter les axes 3 et 4 de votre plan PFAS pour « améliorer la connaissance des rejets et l’imprégnation des milieux » et « identifier les sites industriels émetteurs […] Les connaissances sont déjà là! il est maintenant temps de prendre des mesures fortes avec des normes de rejets strictes et une obligation de surveillance des PFAS dans l’eau potable, partout en France et tout de suite (et pas en 2026) ».

Le règlement européen sur les substances chimiques (REACh) plus que jamais nécessaire

Le 1er mars a eu lieu un débat en Commission Environnement concernant le règlement REACh.

REACh en deux mots

La règlementation cadre sur les substances chimiques #REACh entrée en vigueur en 2007, est en cours de révision. L’objectif de ce règlement est d’avoir une meilleure connaissance des effets des substances chimiques sur la santé humaine et sur l’environnement pour une gestion efficace des risques liés à l’utilisation de ces produits, tout en maintenant la compétitivité et en renforçant l’esprit d’innovation de l’industrie chimique européenne.

Une des conclusions de ce temps fort, relayée par le média Contexte, est l’aveu de l’ampleur politique du règlement par la Direction Générale européenne de l’Environnement. « Nous faisons de notre mieux pour rendre cette proposition disponible et actée par le collège [des commissaires] le plus tôt possible. Mais, c’est aussi une décision politique en soi », a déclaré Aurel Ciobanu-Dordea, directeur à la DG Environnement, le 1ᵉʳ mars. (Contexte)

Cette déclaration survient après différentes interpellations des eurodéputés qui argumentaient en faveur d’une publication rapide de la proposition de règlement, d’ici juin, alors que la publication de la révision aurait été décalée fin 2023, afin de pouvoir avancer sur le sujet avant les élections européennes de 2024 qui induisent le changement des élus de la Commission européenne. « Au nom de l’environnement, mais aussi de la compétitivité [de l’industrie], présentez votre proposition au plus vite », a plaidé l’élu slovaque Martin Hojsík (Renew). « Si Reach n’arrive qu’en décembre […], alors vous créez de l’incertitude pour le marché pour au moins deux années supplémentaires », a déploré Bas Eickhout (Verts). 

Générations Futures a organisé une campagne française interpellant le gouvernement française a se positionner officiellement; objectif atteint lors d’une prise de parole de Bérangère Couillard, Secrétaire d’Etat à l’Ecologie dans l’hémicycle européen. 

Néanmoins, la bataille est loin d’être finie contre les lobbies de l’industrie chimique qui bloque ouvertement l’avancée de ce dossiers politiques.

Participer à la future consultation publique

Comme le rappelle Stéphane Horel, journaliste du journal Le Monde qui a participé au projet Forever pollution project, la publication de cette enquête a pour objectif de sensibiliser les citoyens à l’enjeu de la pollution des PFAS pour les outiller et les inciter à participer à la consultation publique qui débutera fin mars.

En effet, suite au dépôt de restriction des PFAS par les 5 pays européens auprès de l’ECHA, une consultation qui durera sur 6 mois aura lieu à partir de fin mars sur le projet de restriction.

Face à l’ampleur de la pollution de ces polluants éternels, il est primordial que les citoyens fassent entendre leurs voix au côté des associations et politiques militants contre ces substances.

Écouter Pauline Cervan, toxicologue chez Générations Futures et Stéphane Horel, journaliste chez Le Monde

L’épisode la Terre au Carré sur France Inter : PFAS, enquête sur ces polluants éternels.

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